lundi 3 décembre 2012

Comment rédiger un "projet de vie ?", par B.Dov Botturi

Cet article a été rédigé par Bernard Botturi, consultant en matière médico-sociale.

Définition du projet de vie  

« L’équipe pluridisciplinaire évalue les besoins de compensation de la personne handicapée en tenant compte de ses souhaits, formalisés dans un projet de vie. Les références mentionnées à l’article L. 146-8 pour l’appréciation de ces besoins sont précisées dans un guide d’évaluation prenant en compte l’ensemble de la situation notamment matérielle, familiale, sanitaire, scolaire, professionnelle et psychologique de la personne handicapée. Le modèle de ce guide d’évaluation est déterminé par un arrêté du ministre chargé des personnes handicapées. » (cf. Décret n° 2008-110 du 6 février 2008).
Il vous faut soigneusement préparer les données que vous présenterez à votre interlocuteur de la MDPH, sachez bien qu’a priori cette personne n’a qu’une faible idée des contraintes de vie que vous pouvez rencontrer, c’est quelqu’un qui n’a qu’une vague idée de ce qu’est un enfant autiste, quand il n’est pas habité par des clichés négatifs, dévalorisants, c’est avant tout un administratif qui va traiter votre dossier de façon administrative.

Quel outil utiliser ?  

Utilisez le guide GEVA, qui est le guide officiel dévaluation des besoins de compensation de la personne handicapée utilisé par la MDPH.
Téléchargez-le, lisez le et commencez à écrire un brouillon en ayant comme modèle ce qui suit.
Demandez à rencontrer les membres de l’équipe pluridisciplinaire de votre MDPH, ou bien prenez rendez-vous avec un agent de la MDPH avec lequel vous allez remplir les différents volets du GEVA.
Ne vous laissez rien imposer, le GEVA est une co-construction, ce n’est nullement un questionnaire à remplir duquel l’équipe pluridisciplinaire tirera un projet de vie.

Si votre démarche d’utilisation du GEVA est contestée par votre MDPH  

Rappelez que le GEVA est désormais la référence nationale pour l’évaluation des besoins de compensation, qu’il s’agit d’un document officiel comme le précise le Décret n° 2008-110 du 6 février 2008 relatif au guide d’évaluation des besoins de compensation des personnes handicapées (GEVA).

Quoi écrire ?  

Ce que vous devez préparer par écrit de la façon la plus factuelle, la plus objective possible c’est l’ensemble des données qui vont permettre d’élaborer un plan de compensation, ce plan ne peut être satisfaisant que s’il répond à uneprésentation détaillée, analysée de vos besoins.
Il est important dans un premier temps de décliner l’ensemble des limitations d’activités et restriction de participation à la vie sociale relatives non seulement au handicap de votre enfant mais aussi à celles qui vont sont imposées de par le handicap de votre enfant.
C’est pourquoi vous devez exposer les différents aspects relatifs à la situation que vous vivez, vous et votre enfant :
  • aides personnelles de divers types
  • logement
  • transport,
  • scolarité,
  • insertion professionnelle,
  • ressources…
     
L’évaluation ne se limite pas à recueillir les éléments strictement nécessaires pour se prononcer sur l’éligibilité à l’une ou l’autre des prestations mais doit être conduite de façon globale, prendre en compte l’ensemble des données biomédicales, psychologiques, sociales, économiques. Elle aborde différentes dimensions de la situation de votre enfant handicapé et de son milieu naturel aidant.
Elle comporte une approche de ses facteurs personnels, de son environnement et des interactions qui existent entre les deux. Elle requiert aussi de prendre connaissance et de mettre en cohérence les autres démarches déjà effectuées par vous en faveur de votre enfant ainsi que les prises en charge et accompagnements dont il bénéficie déjà.
Vous pouvez demander à ce que des personnes de la MDPH se déplacent chez vous pour se faire une idée précise de vos conditions de vie.

Exemples de points à décrire  

  • Capacités à se déplacer, se repérer dans un environnement familier, proche, sens de l’orientation, quel besoin d’accompagnement pour se déplacer ? Risque de mise en danger ? Les points de vigilance ?
  • Quelles sont ses repères dans le temps, dans l’espace ?
  • Quelles sont ses limites en termes de motricité fine ?
  • Quelles sont ses degrés d’autonomie, de dépendance pour le lever, la toilette, la prise des repas, l’habillage, l’élimination ?
  • La communication : compréhension des consignes ? Degré de verbalisation ? Utilisation de supports de communication (Makaton, PECS, utilisation de tablette, etc.)
  • Les risques liés à communication à autrui, à la maîtrise de ses émotions ?
  • Quelle est son degré de fatigabilité ? ses difficultés de concentration, d’attention ?
  • Quels sont ses troubles associés (épilepsie, retard mental, diabète, allergies, etc.) ?
  • Quels sont les besoins d’accompagnement aux gestes de la vie quotidienne, d’une surveillance régulière (présence d’une Auxiliaire de Vie Sociale) ?
  • Quels sont les frais liés à l’activité professionnelle de la famille ?

Donnez des indications quantitatives horaires  

a.) — Toilette
Le temps quotidien d’aide pour la toilette, y compris le temps nécessaire pour l’installation dans la douche ou la baignoire, qui peut atteindre 70 minutes. Il faut décomposer les activités : le temps d’aide humaine pour la réalisation d’une toilette au lit, au lavabo, par douche ou bain, comprend le temps nécessaire pour l’installation dans la douche ou la baignoire. Il faut prendre aussi en compte d’autres éléments contribuant à prendre soin de son corps, notamment l’hygiène buccale (le cas échéant l’entretien de prothèses dentaires), le coiffage, éventuellement le rasage… Il convient, concernant la nature de l’aide, de tenir compte du fait qu’il peut s’agir d’une aide pour la toilette complète ou d’une aide pour la toilette pour une partie du corps.
b.) — Habillage
Le temps quotidien d’aide pour l’habillage et le déshabillage peut atteindre 40 minutes. Cela comprend les activités « s’habiller » et « s’habiller selon les circonstances ». « S’habiller » comprend l’habillage et le déshabillage et, le cas échéant, le temps pour installer ou retirer une prothèse. Il convient, concernant la nature de l’aide, de tenir compte du fait que l’aide peut porter sur la totalité de l’habillage ou seulement sur une partie (aide pour l’habillage du haut du corps ou au contraire du bas du corps).
c.) — Alimentation
Le temps quotidien d’aide pour les repas et assurer une prise régulière de boisson peut atteindre 1 heure et 45 minutes. Ce temps d’aide prend aussi en compte l’installation de la personne. Il ne comprend pas le portage des repas ni le temps pour la préparation du repas lorsque ce temps est déjà pris en charge ou peut l’être à un autre titre que la compensation du handicap. Ce temps se décompose en activités « manger » et « boire ». Le temps d’aide prend aussi en compte l’installation de la personne pour prendre le repas, y compris couper les aliments et/ou les servir et assurer une prise régulière de boisson hors des repas. Des facteurs tels que l’existence de troubles de la déglutition, notamment s’ils nécessitent le recours à une alimentation spéciale, hachée ou mixée, peuvent être de nature à justifier un temps d’aide quotidien important.
d.) — Élimination
Le temps d’aide quotidien pour aller aux toilettes comprend le temps nécessaire pour l’installation, y compris les transferts entre les toilettes et le fauteuil. Il peut atteindre 50 minutes.Les actes concernant l’élimination qui relèvent d’actes infirmiers ne sont pas pris en compte. Cela comprend les activités suivantes : « assurer la continence » et « aller aux toilettes ». « Aller aux toilettes » comprend notamment le fait de se rendre dans un endroit approprié, de s’asseoir et de se relever des toilettes. Les actes concernant l’élimination qui relèvent d’actes infirmiers ne sont pas pris en compte.
Les déplacements : le temps quotidien d’aide humaine pour les déplacements dans le logement peut atteindre 35 minutes. Il s’agit notamment d’une aide aux transferts, à la marche, pour monter ou descendre les escaliers ou d’une aide pour manipuler un fauteuil roulant. Les déplacements à l’extérieur exigés par des démarches liées au handicap de la personne et nécessitant la présence personnelle de celle-ci peuvent majorer le temps d’aide attribué au titre des déplacements à concurrence de 30 heures par an.
e.) — La participation à la vie sociale
La notion de participation à la vie sociale repose, fondamentalement, sur les besoins d’aide humaine pour se déplacer à l’extérieur et pour communiquer afin d’accéder notamment aux loisirs, à la culture, à la vie associative, etc. Le temps d’aide humaine pour la participation à la vie sociale peut atteindre 30 heures par mois. Il est attribué sous forme de crédit temps et peut être capitalisé sur une durée de 12 mois.

Donnez des indications quantitatives financières   

Coûts des alèses, couches, lingettes.
Coûts des nourritures spécifiques indiquées par un médecin diététicien
Coûts des déplacements
Coût de l’aménagement d’une salle d’éveil et jeux, (joindre un devis)
Coût du recours à un psychologue/psycho-rééducateur pour des séances d’éducabilité (notes d’honoraires, attestation du praticien).

Le volet médical  

Là vous devez indiquer la pathologie à l’origine du handicap. Ici il s’agit de Trouble du Spectre Autistique (TSA), vous devez apporter un diagnostic de TSA posé soit par le Centre Ressource Autisme de votre région, soit par un neurologue, soit par un psychiatre.
Attention : les orthophysiciens (psychomotriciens, orthophonistes, psycho-rééducateurs) tout comme les psychologues ne sont pas habilités à poser un diagnostic d’autisme, ils peuvent exprimer des doutes, des soupçons, vous inviter à faire faire un diagnostic par un neurologue, un pédopsychiatre, un psychiatre, mais en aucun cas faire un diagnostic.
Faites une histoire de la maladie les premiers signes de manifestation, son évolution, son dépistage.

Description clinique  

Basez-vous sur la description par la CIM-10 ou du DSM IV-R
Dans plusieurs cas, on retrouve aussi un diagnostic de retard mental. Les sujets peuvent également présenter de l’hyperactivité, un déficit attentionnel, de l’impulsivité, de l’agressivité, des comportements d’automutilation et, surtout chez les plus jeunes, des crises de colère. Les réponses aux stimuli sensoriels peuvent être inhabituelles (seuil élevé à la douleur, hypersensibilité au bruit ou au contact physique, réactions démesurées à des lumières ou à des odeurs). On peut observer également des anomalies du comportement alimentaire (restriction de l’alimentation à quelques aliments seulement) ou des troubles du sommeil (fréquents réveils nocturnes suivis de balancements). Les perturbations de l’humeur ou des affects sont fréquentes (p. ex. crises de rires ou de larmes inexpliquées, absence apparente de réactions émotionnelles).
Ces descriptions vont vous servir de guide pour rédiger par des exemples concrets ce que vous constatez chez votre enfant. Si votre enfant à fait des séjours d’observation en hôpital demandez son dossier médical.

Conclusion  

Cette préparation vous permettra de pouvoir remplir le GEVA et ses différents volets de façon sereine, munie de vos notes, d’un GEVA déjà bien rempli, dont vous connaissez les différentes rubriques.
N’hésitez pas à demander de rencontrer les divers membres de l’équipe pluridisciplinaire, ces rencontres permettront une information partagée par chacun des membres…. Certes cela peut prendre du temps, mais cet investissement est nécessaire pour éviter les mauvaises surprises. Les rencontres permettent également d’établir des liens de partenariat.
Lors de vos rencontres, dites vous bien que vos interlocuteurs sont habitués à entendre toute la misère du monde et sont donc souvent dans une attitude de défiance, d’autant par cette période de crise où des personnes vont simuler des handicaps pour obtenir des revenus. Pour entretenir des relations de partenariat, évitez tout discours émotionnel, ils n’y font plus attention, restez dans le registre de l’exposition des faits, de l’explication « rationnelle », évitez tout discours revendicatif, quelle que soient vos motifs d’énervement, gardez en tête qu’il y va de l’avenir de votre enfant et que vous êtes en face de gens qui ont un pouvoir de décision, pour le meilleur comme le pire. Le discours de volonté coopérative sera perçu par vos interlocuteurs comme valorisants et feront d’eux des alliés sur lesquels vous pourrez compter.

Rappel de vos droits  

Vos droits fondamentaux, les droits :
Au respect de la dignité, l’intégrité, la vie privée, l’intimité et la sécurité de votre enfant handicapé et de vos droits de parents
Au libre choix entre les prestations : domicile établissement…
À un accompagnement individualisé et de qualité dans le respect d’un consentement éclairé.
À La confidentialité des données concernant votre enfant.
À l’accès à l’information
À une information sur les droits fondamentaux et voies de recours.
À une participation directe au projet de vie.


Exemples de projets de vie

Des exemples sont disponibles sur le site (très riche) du collectif Egalited

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